Nos réalisations

 

Critiques

 

MAMANPOURLAVIE

La prématurité tragique, lumineuse & normale de Violette

Par Maude Goyer, journaliste

Montréal, novembre 2015

 

LIVRE: RESPIRE,BÉBÉ,RESPIRE


 

Photo QA/ LMEA: Respire, bébé, respire ! - Oct. 2015

 

 

RESPIRE, BÉBÉ, RESPIRE !

 

 

MAMANPOURLAVIE

La prématurité tragique, lumineuse & normale de Violette

Par Maude Goyer, journaliste

Montréal, 18 novembre 2005

 

Un bébé sur dix nait prématurément. Annie janvier le savait, ça : elle travaillait comme médecin pédiatre spécialisée en néonatologie a l’hôpital Sainte-Justine depuis plusieurs années.

 

Puis, elle a accouché de Violette, sa fille née à 24 semaines 5 jours de grossesse en 2005.

 

Elle pesait 670 grammes. Elle était intubée, branchée, monitorée, surveillée. Annie Janvier et son conjoint Keith, déjà parents d’Axel (aujourd’hui âgé de 12 ans), ne savaient ni si leur fille allait s’en sortir ni si elle garderait des séquelles de sa naissance prématurée. Habituée à vivre ce genre d’expérience, et ces montagnes russes d’émotions, la médecin faisait toutefois face pour la première fois à la douloureuse réalité en tant que parent. « Savoir comment fonctionne un respirateur pour prématurés ne nous aide aucunement à savoir comment être la maman d’un bébé prématuré placé sous un respirateur », résume-t-elle avec justesse.

 

Plongée dans le doute, l’angoisse, la culpabilité, Annie Janvier s’est mise à tenir un journal de bord sur son ordinateur. Des bribes de ces moments quotidiens, déchirants et lumineux à la fois, sont parvenues à son collègue de travail, le docteur Jean-François Chicoine. Tous deux s’échangeaient des courriels. « Mis bout à bout, ces courriels commençaient à ressembler à un livre, dit-il. Quand on regardait l’ensemble, cela avait un sens ». Directeur de la collection littéraire La santé du monde, le Dr Chicoine a accompagné son amie « au caractère insoutenable et à l’intelligence redoutable » dans son processus. 

 

Le livre Respire, bébé, respire!, lancé hier, parle non seulement de l’épopée d’Annie, Keith et Violette (qui pète le feu aujourd’hui), mais raconte aussi les histoires, tantôt belles tantôt dramatiques, des innombrables familles croisées par la médecin dans sa pratique en néonatologie. « J’ai écrit ce livre pour aider d’autres parents qui sont dans cette situation, explique l’auteure. Je veux démystifier la prématurité. Tout ce dont on entend parler, lorsqu’il est question de prématurité, c’est d’acharnement thérapeutique, de bébés miracles ou d’enfants handicapés... Je voulais parler des bébés prématurés normaux, ordinaires. »

 

Dans un style simple, touchant, drôle aussi (et ponctué de sacres!), la pétillante pédiatre livre un récit franc, sans chichi, sans détour. Elle confie tout : ses moments sombres, ses espoirs, ses craintes et cette collante culpabilité, dont elle a eu de la difficulté à se défaire. « J’ai fait et refait dans ma tête le scénario mille fois des vingt jours avant la naissance prématurée de Violette, dit-elle. Qu’est-ce que j’avais bien pu faire pour que ça m’arrive? Mais ce qu’il faut que les femmes sachent c’est qu’il n’y a rien, RIEN, qu’elle aurait pu faire pour éviter cela ».

 

Son livre aborde aussi le grand désarroi des parents devant l’absence de contrôle, une réalité qu’a vécue Martin-Luc Archambault, entrepreneur (que l’on a vu à l’émission Les Dragons) et père de Marcel, deux ans, né prématurément. « Il a été placé en incubateur trois ou quatre semaines, souligne-t-il, et je n’avais aucun contrôle. Moi qui aime la liberté de contrôler ma destinée, je n’avais aucun pouvoir : c’est la nature qui décidait. Pour l’une des premières fois et seules fois de ma vie, j’ai pleuré ». L’homme d’affaires et sa conjointe Magali se sont joints hier au lancement du livre afin « d’informer et sensibiliser la population » ajoute M. Archambault.

 

Quoi dire aux parents d’enfants nés prématurément? Les féliciter pour la naissance n’est pas un bon choix… ni poser la question « mais pourquoi cela t’est arrivé? ». Annie Janvier croit qu’il faut tenter de chasser la culpabilité des mères (« il faut en parler! », conseille-t-elle), inviter les parents à se « trouver un porte-parole » (pour disséminer les nouvelles, bonnes ou mauvaises, et alléger la tâche des parents), écouter les parents sans « essayer de contrer leurs humeurs, juste en vivant le moment présent », donner de l’espoir et prendre des photos. « Je trouvais mon conjoint vraiment fatigant et bizarre de prendre des photos de Violette alors que ça allait mal, mais aujourd’hui, je suis heureuse d’avoir ces souvenirs…

 

 

 

Tous droits réservés - Copyright © 2015 - Le monde est ailleurs

 


Retour