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MSM ACTUALITÉS

On l'attendait depuis longtemps

Par Jean-Benoît Nadeau

Québec, mai 2013

 

LE SOLEIL

L'art de devenir parent par adoption

Par Laurie Richard, journaliste, Québec

Montréal, 28 avril 2013

 

 

LIVRE: LA NORMALITÉ ADOPTIVE


 

Photo QA/ LMEA: La normalite adoptive 2013

 

 

LA NORMALITÉ ADOPTIVE

 

Vous songez à adopter, vous êtes sur le point d’accueillir un enfant par adoption ou vous êtes déjà parent adoptant? Ce livre vous apportera des réponses et surtout des solutions concrètes pour exercer ce rôle de parent, à la fois semblable et différent de la parentalité bio­­logique. Fondée sur des connaissances scientifiques solides, une longue expérience professionnelle et sur le vécu de milliers de familles adoptives, l’auteure vous offre l’essentiel de son approche éducative et psychosociale : l’adopte­parentalité. L’Adopteparentalité est désormais une collection où l’enfant adopté est au cœur des préoccupations et le parent au cœur des solutions. Dans ce premier ouvrage, vous recevrez les 12 clés essentielles pour vous aider, vous et l’enfant, à connaître, à comprendre et à célébrer sa normalité adoptive.

 

Ce livre deviendra rapidement un ouvrage de référence.

Marie-Claude Barette, Le lundi, 2013

 

MSM ACTUALITÉS

On l'attendait depuis longtemps

Par Jean-Benoît Nadeau, journaliste, Montréal

Québec, mai 2013


On l’attendait depuis longtemps, mais Johanne Lemieux vient enfin de publier son livre La normalité adoptive (Québec Amérique). Cette grande spécialiste de l’adoption, travailleuse sociale et psychothérapeute, s’est taillée une place unique dans le monde francophone depuis 20 ans. Depuis en fait le choc de l’adoption de son deuxième enfant, un garçon, en Thaïlande.

 

Je l’avais rencontrée une fois, il y a sept ans, alors que je me préparais à adopter des jumelles en Haïti et j’avais été impressionné – formé et rassuré, devrais-je ajouter – par son propos très documenté.

 

Il faut dire qu’avec Johanne Lemieux, on est devant un personnage qui parle fort et direct, de façon très imagée, très généreuse de ses conseils, et qui ne va pas avec le dos de la cuillère à pot quand il faut remettre les pendules à l’heure.

 

Johanne Lemieux se distingue par son discours sur la « normalité adoptive » : c’est -à-dire que les enfants adoptés ne sont pas comme des enfants non adoptés et que cela se passe bien quand les parents le reconnaissent. Ils ne sont pas anormaux non plus, seulement, tout se passe bien pour les parents qui reconnaissent que leur enfant, même très jeune, a déjà acquis un bagage d’expériences qui vont le marquer à vie – une « mémoire sans souvenirs», comme elle l’écrit joliment.

 

Mère de trois enfants adoptifs – Québec, Thaïlande, Cambodge –, Johanne Lemieux a pris le taureau par les cornes il y a 20 ans suite à l’adoption de son deuxième enfant, très malade, en Thaïlande, une expérience qui a failli tourner à la catastrophe et qu’elle raconte crument par touche.

 

C’était l’époque où l’adoption internationale se popularisait, mais où l’on entretenait le mythe que tout se règlerait « avec de l’amour » pour ses « pauvres enfants ».

 

Devant la nécessité, Johanne Lemieux s’est donc documentée. Ses idées pour son livre, elle les a largement puisées dans son expérience personnelle de mère, ses observations de consultante, et chez les auteurs américains, britanniques, australiens, dont elle dévore les ouvrages depuis 20 ans.

 

Johanne Lemieux, qui n’est pas écrivaine, admet en avoir arraché pour écrire son livre et pour traduire en texte ce qu’elle a tant d’aisance à dire. Le résultat est un livre bien écrit, sans tomber dans le jargon. On entend d’ailleurs très clairement sa voix. Le livre, qu’elle amorce en déconstruisant une douzaine de mythes, est bourré de trucs et de conseils et constitue, selon moi, une magnifique réflexion pour quiconque veut être parent – adoptant ou non.

 

L'adoption internationale à repenser

En entrevue, Johanne Lemieux apporte une perspective intéressante sur les bouleversements actuels du système d’adoption internationale. En fait, selon elle, les beaux jours de l’adoption internationale sont sans doute finis. De même que l’espèce d’industrie touristico-adoptive (l’expression est de moi) mise au point par divers pays, la Chine en particulier.

 

C’est la faute de la Convention de La Haye sur l’adoption internationale, qui établit les règles du jeu en la matière. Cette Convention existe depuis 1993, mais elle est sérieusement mise en application depuis 10 ans et ses effets sont sensibles depuis cinq ans.

 

Un principe fondamental de cette convention est d’encourager la « subsidiarité », c’est-à-dire l’adoption locale. Cela bouleverse tout le paysage. Jadis, les adoptants avaient le choix de passer par les réseaux locaux à travers les Centres jeunesse ou de passer par les réseaux internationaux. Plusieurs préféraient passer par l’étranger tout simplement parce que cela leur garantissait un enfant parfois très jeune avec de courts délais, sans contact avec la mère biologique.

 

Désormais, les pays signataires s’efforcent de faire adopter ces enfants localement.

 

Ce qui veut dire que les Québécois qui veulent au beau bébé chinois ou haïtien, sans handicap ou problème particulier, doivent attendre leur tour cinq, six, huit ans au lieu d’une année.

 

Le seul moyen d’accélérer le processus est d’accepter un enfant présentant des « besoins spéciaux » — handicap physique ou mental, ou carences graves.

 

Elle m’a parlé de la directrice du Centre jeunesse de Montérégie qui fait des évaluations de parents qui veulent adopter une fratrie d’Ukrainiens de 7, 5 et 3 ans dont un a été violé par sa mère alcoolique et dont les deux frères sont SAF (syndrome d’alcoolisme fœtal).

 

Bref, il n’y a presque plus de différence entre les réseaux locaux et internationaux.

 

Grande question sociopolitique : a-t-on besoin d’aller chercher ailleurs des cas semblables quand nos Centres jeunesse ici débordent? À fortiori quand on sait que les Centres Jeunesse offrent toute une batterie de services gratuits pour les enfants en adoption locale (orthophonie, suivi thérapeutique, etc.), services que de nombreux parents en adoption internationale doivent payer de leur poche.

 

Autre conséquence de la Convention de La Haye, les services sociaux des autres pays tendent à appliquer des principes – le bien de l’enfant – qui sont les mêmes que ceux des Centres jeunesse. Ce qui veut dire que l’adoption n’est pas pour le « bien du parent », mais pour celui de l’enfant.

 

Les travailleurs sociaux locaux, comme ceux du Québec, donneront donc priorité aux parents qui offrent la meilleure chance à des enfants qui n’en ont eu aucune jusqu’à présent. Leur travail consiste à aider des enfants, pas à prendre des adoptants en pitié.

 

Autrement dit, un couple jeune en santé pourvu de moyens corrects aura plus de chance que les adoptants qui ne se conforment pas à ce profil – trop vieux, malades, présentent un risque de santé ou social. Si vous pensez que cela est cruel pour les adoptants, vous ne comprenez pas le principe : le bien de l’enfant.

 

Adoptée en France

À ma grande surprise, l’expérience de Johanne Lemieux apporte également un éclairage intéressant sur les Français.

 

Car il faut dire qu’elle a été adoptée par le public français, belge et suisse, où elle donne de nombreuses conférences et où ses livres se vendent autant là-bas qu’ici – un fait d’armes dont seuls quelques auteurs peuvent se vanter.

 

Elle m’a expliqué que les besoins des parents français sont sensiblement les mêmes que ceux d’ici. La différence vient du rejet très fort des professionnels français à son égard. Ceux-ci n’acceptent pas qu’elle donne ses trucs.

 

Bref, les parents français adorent parce qu’elle est la seule qui leur donne des outils au lieu de les culpabiliser par des approches psychanalytiques du genre « trouve ta solution » qui sont bonnes pour les affaires des thérapeutes, mais pas nécessairement constructives.

 

L’autre raison de l’animosité qu’elle suscite tient au fait que ses sources sont « anglo-saxonnes » (américaines, britanniques et australiennes), ce que ses collègues français rejettent. On l’accuse de « macdonaldiser » la pratique.

 

Personnellement, je vois dans cette anecdote une illustration intéressante de certains problèmes de la France, où ceux qui ont l’autorité ou le savoir refusent de se remettre en question, en dépit du bon sens.

 

Je sais bien que je généralise, mais le témoignage de Johanne Lemieux en ce sens est éloquent.

 

*****

Jean-Benoît Nadeau

Collaborateur au magazine L'actualité, Jean-Benoît Nadeau a une carrière bien remplie. Il a signé cinq livres et 700 articles de magazine, qui lui ont valu 45 prix de journalisme. Après six mois quelque part à l'ouest du Pecos, il nous revient de ce côté de la rivière des Outaouais pour parler de langue française, de ses filles, du changement climatique, de la bonne façon de préparer la choucroute et aussi encore des États-Unis, car nous sommes tous Américains.

 

 

LE SOLEIL

L'art de devenir parent par adoption

Par Laurie Richard, journaliste, Québec

Montréal, 28 avril 2013

 

Les enfants adoptés ont une réalité bien à eux, des caractéristiques qu'ils partagent tous et qui les différencient des autres. Ces bébés ont vécu de grandes épreuves. Il faut en tenir compte, et ne pas tenter à tout prix de les «transformer en enfants biologiques». Leurs parents doivent prendre conscience qu'ils ont un travail plus grand devant eux.

 

Johanne Lemieux, travailleuse sociale et psychothérapeute au Bureau de la consultation en adoption de Québec, a lancé officiellement début avril l'ouvrage La normalité adoptive, premier tome d'une série de quatre livres de référence sur l'«Adopteparentalité», soit l'art de devenir parent par adoption. La collection fera le tour de la question de l'enfant adopté, de ses premières années à la majorité en passant par les enfants adoptés qui ont des besoins spéciaux.

 

«Lorsque les nouveaux parents arrivent à l'aéroport avec leur bébé, et qu'ils rencontrent la famille, on a l'impression que l'adoption est terminée, alors qu'elle vient de commencer», affirme l'auteure. Il faudra, tout au long de sa vie, aider cet enfant à panser ses blessures, visibles et invisibles. «Ce sont des traces qui vont rester là toute leur vie, il ne faut pas avoir honte.»

 

«Il n'aurait pas été donné en adoption s'il n'avait pas vécu la "malnutrition" à plusieurs niveaux.» Elle parle ici de malnutrition alimentaire, mais aussi d'un manque au plan sensoriel (il ne sera pas touché beaucoup par sa maman), au niveau affectif, cognitif (pas de beaux livres pour lui), et social (à l'orphelinat, il ne connaît pas la vie de «famille»).

 

Il y a 20 ans, lors du boum d'adoption internationale au Québec, «on n'avait pas les connaissances d'aujourd'hui sur le développement du cerveau». L'adoption était d'ailleurs beaucoup plus taboue au Québec avant cette vague, rappelle Mme Lemieux. On en parlait donc peu.

 

Mme Lemieux rapporte que des recherches médicales ont démontré que ce que l'enfant absorbe en très bas âge a un impact sur la façon dont le cerveau se bâtit. «Les hormones de stress ont un impact énorme sur le cerveau de l'enfant». Un petit ne peut pas se calmer seul, il sera stressé quand il a froid, faim, qu'il est mouillé... et si on ne répond pas à ses besoins, le stress s'accumule.

 

«Ces bébés adoptés ont mariné, comme des cornichons, dans les hormones de stress! Cela laisse des traces sur leur pauvre petit cerveau!» D'où les tâches supplémentaires pour les parents, note l'auteure.

 

Expérience personnelle

Mme Lemieux n'est pas devenue spécialiste de l'adoption par hasard. Elle est elle-même maman adoptive de deux filles et d'un garçon. Son aînée est née au Québec; le processus d'attachement n'a pas été très difficile puisqu'elle a eu sa fille assez tôt après sa naissance.

 

C'est lorsqu'elle se rend en Thaïlande pour aller chercher son fils qu'elle a un choc terrible, quelque chose dont jamais personne ne lui a parlé. Sa première rencontre l'a bouleversée : son petit était malade, il était laid et il hurlait. Les deux partis étaient terrorisés, raconte-t-elle dans son livre. Qu'allait-elle faire avec ce petit être mal en point?

 

Elle a consulté des spécialistes, fait de nombreuses recherches et finalement décidé de partager les découvertes qui l'ont beaucoup aidée avec son fils, qui a aujourd'hui 18 ans. Mieux outillée, elle a même adopté une autre petite fille par la suite, au Cambodge.

 

Johanne Lemieux veut aujourd'hui transmettre aux autres les ingrédients supplémentaires nécessaires à la «recette» parentale, lors d'une adoption. «On ne peut pas monter l'Everest en shoe-claques et en t-shirt!» En préface de l'ouvrage, le pédiatre Jean-François Chicoine indique que Mme Lemieux «est à l'adoption ce que la sage-femme est à la naissance».

 

L'auteure souhaite faire comprendre au lecteur qu'on doit s'occuper des enfants adoptés tels qu'ils sont et non pas tels qu'on voudrait qu'ils soient. «On a longtemps pensé qu'avec beaucoup d'amour, de bons soins et beaucoup de volonté, que leurs parents allaient réussir à les transformer en enfants "biologiques". Et si ces enfants devaient gérer des caractéristiques différentes, on concluait que c'était pathologique.»

 

La réalité se situe entre les deux. Les enfants adoptés seront toujours un peu différents des autres. Ils partagent tous «options supplémentaires», qui sont la norme, indique Mme Lemieux. Il faut les élever en tenant compte de celles-ci, appuie-t-elle. Il faut célébrer leur «normalité adoptive» qui en fait des êtres uniques.

 


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